Championnat de France de marathon 2022

Dernier appel pour tous les athlètes ! En 2023, il faudra réellement se qualifier pour les championnats de France avec des minimas chronométriques :) Ce dimanche 20 novembre 2022 se courait le marathon de Deauville, support des championnats de France. Tocardo, qualifié comme tous les licenciés FFA ayant couru un marathon dans l’année précédente, s’était inscrit en open. Histoire de ne pas faire comme tout le monde :) 2022 était la dernière année possible de participer à un championnat de France de marathon sans réaliser le moindre chrono qualificatif. Ce sera d’ailleurs un record de participation, avec pas moins de 700 athlètes inscrits sur ces championnats de France, un record. Cela sent l’effet d’aubaine. Mais désormais, la FFA, dans un éclair de lucidité, a remis en place les minimas chronométriques, fer de lance de la motivation de ses licenciés. Rien de mieux que d’être motivé pour réaliser un chrono. Par ailleurs, le parcours du marathon de Deauville n’étant pas favorable à la réalisation d’un chrono, cela montre tout le paradoxe de cette situation.

C’est avec une météo pour le moins fraîche, venteuse et pluvieuse que les athlètes allaient donc en découdre avec cette boucle à courir 2 fois. Ces championnats de France nous permettront tout de même d’écouter une version chantée de la Marseillaise. Un signe d’annonce de la pluie à venir ?

Deauville, la bien nommée, une ville d’eau !

Tout ne commençait pas si mal. Arrivé samedi sur les lieux, le vent était des nôtres, mais point de pluie. La météo annonçait pour la nuit et le lendemain des épisodes pluvieux. La météo est devenue malheureusement vraiment fiable. Il faisait un petit 8°C ce dimanche matin, rien de bien méchant, et préférable aux épisodes de canicules estivales. Toutefois, comme beaucoup, je ne suis pas contre la poursuite du réchauffement climatique en période hivernale. Cela aurait également un effet bénéfique sur la consommation de gaz de notre pays, vu que nous sommes fâchés avec les Russes. Car pour se rendre sur le départ, avec cette température et ce taux d’humidité important, les rhumatismes rappellent rapidement le poids de l’âge. Mais, puisque toujours se plaindre est le propre de Tocardo, aucune pluie n’est venue troubler le cérémonial du départ. En revanche, un manque d’ordre...

Consigne et SAS de départs, un parfum de débordement...

Comme déjà évoqué, l’organisation ne s’attendait peut-être pas à un tel succès. Toujours est-il que, bien que les bénévoles affectés à la gestion des consignes se démenaient comme des héros, le bazar régnait au niveau des flux de circulation des athlètes. Rien de bien méchant, rien à voir avec les courses parisiennes de la grande époque, mais cela en avait quand même un peu la tournure. Sans doute pour cela que Deauville est surnommée le 21ième arrondissement de Paris. Bref, arrivé sur la zone de départ trop tardivement, devant tout cet encombrement, je n’ai pas réussi à rentrer dans mon sas des 3 heures (que je n’aurais pas pu honorer dans tous les cas). Bilan, je rentre avec la flamme des 4h15 en me disant que je pourrais accélérer dans les premiers km pour dépasser cette meute et ainsi courir à mon rythme. En fait, non. Ce ne sera pas possible.

Top c’est parti

Après la Marseillaise, c’est parti pour les élites et les athlètes engagés sur le championnat de France. La course Open part quelques instants plus tard. Mais surprise, par vagues. Dommage pour moi. La première vague englobe les 3h15, donc mes espoirs de rejoindre ce groupe s’estompent. Et les premiers km vont confirmer que partir bien placé sur ce parcours est crucial. Après un premier km (bouclé en 5 min 15 sec, alors que je pars habituellement sur un rythme de 4 min 20 sec), sur un petit aller/retour histoire de chauffer les runnings, direction le long de l’hippodrome et entrée sur des passages bitumés de 3 mètres de large, ponctués par des portails. My God... Seriously ? La partie routière précédente m’a permise de revenir sur le groupe des 3h30. Mais désormais, nous entrons dans une zone peu propice aux dépassements. Avec les deux meneurs d’allure 3h30 courant de front, l’un à côté de l’autre, ce sont une centaine d’athlètes agglutinés derrière, tels un essaim d’abeilles derrière un pot de miel. Impossible de dépasser, du grillage des deux côtés. Genre, un bouchon, je klaxonne, je m’agace, appels de phares, je fais ronfler le moteur, vroumer le pot d’échappement (oui, oui, dès fois cela fonctionne...), mais rien n’y fait. Quand, un athlémobiliste m’interpelle. Et M. Lapalus que faîtes-vous donc là ? Ah, une connaissance de mon club de running. My God. Nous entamons donc une discussion longue et variée sur l’existence des mammifères ultramarins à sang chaud en Caroline du Nord, histoire de patienter durant les bouchons. J’en profite pour lâcher quelques (tu penses à quoi ? Non, mais ce ne va pas ! T’es dégueux !) blagues pourries que personne ne m’envie. Et puis c’est la sortie de cet espace restreint, j’arrive à m’extraire de ce faux rythme, vraiment trop fatiguant. Ils ont bien du mérite (hé, je blague !).

Km au sol, un vrai GPS

Ce qui est top sur ce parcours, c’est le kilométrage marqué au sol, franchement sympa. Cela permet de voir l’écart de mesure avec sa montre et ainsi de faire quelques statistiques en attendant que le parcours ne défile sous nos pas. Le parcours est assez orienté cambrousse. N’espérez pas longer l’océan durant 10 bornes, la partie exposée aux vents du large est très restreinte. L’essentiel du parcours se dessine du côté de Tourgeville. Des petites bosses coquines viennent chatouiller les mollets, c’est très sympa, surtout au second tour du parcours.

Des ravitos, des bénévoles et des supporters

Sur ce marathon quand vous voyez une troupe de supporters, c’est qu’il s’agit d’une zone de relais. Cela attire des foules, car le long du reste du parcours, il vous faudra vous occuper l’esprit. Pas grand chose à regarder, hormis des champs, même pas vu de vaches, la mauvaise saison sans doute. Les ravitos sont biens, rien à critiquer (c’est dingue...). Il y a même du Coca :). Par contre, il n’y avait pas de glace à la mangue. Franchement, l’orga pourrait faire des efforts.

Des champions de France, M6, M7 et M8 !

Osez calculer les âges de ces héros du marathon. Un indice M4 c’est 55/60 printemps, M5 c’est 60 balais, M6 tu as 65 piges, M7 70 berges, donc M8 c’est plus de 75 ans ! Courir un marathon en M8, tu prends le dossard dès maintenant ? Moi, grave oui, je signe tout de suite ! J’ai eu l’opportunité de discuter avec plusieurs de ces héros, durant la course. Et ils étaient grave à l’aise ! Et ils avaient une belle allure, rien à voir avec certains qui semblent agoniser durant l’effort. Je n’avais aucunes craintes pour eux (sans quoi je n’aurais pas engagé la conversation de peur de leur provoquer une mort certaine). Si cela est permis à tous, je leur ai demandé leur petite recette. Ils sont unanimes, ne jamais s’arrêter de courir, c’est le seul secret ! Secret, qui n’en est plus un du coup. Voilà donc, vous êtes averti, il ne faut pas s’arrêter. Jamais. Never. Get it ? Never give up !

Une averse type fin du monde

Je pense qu’ils appellent cela un grain ici. Une pluie et des rafales de vent, de face, pendant une petite dizaine de minutes, en mode, on y voit plus rien. Plus personne dans les rues, c’est la fin du monde. L’eau est froide, et cette douche non demandée n’est pas la bienvenue. Mais bon, on a signé pour. Nous sommes au mois de novembre, faut pas se plaindre. Et puis, cet épisode se termine rapidement. Le moral en a pris quand même pour son grade. Tout est trempé. Oui, tout (si aussi).

La fin d’un semi n’est que le début d’un autre...

À 4 ou 5 km de la fin du premier semi, cela sent bon le retour à la civilisation. Deauville, we’re back in Deauville ! Et puis c’est la découverte du bord de mer (ou de l’océan si vous préférez, enfin bref, une grande étendue d’eau qui bouge davantage qu’un lac). Sonne bientôt alors la fin du semi, tous les athlètes regardent avec attention leurs montres. Tic Tac... Et Tocardo ? Ben pareil. Et du coup je dois passer en 1h38 ou un truc comme cela, pas terrible, mais vu que j’ai mis en route seulement à partir du km 7 ou 8 c’est bien. J’ai donc fini mon fractionné et vais pouvoir terminer mon entraînement en endurance, car pour un joli chrono sous les 3h15, c’est définitivement mort. Donc je redescend d’allure pour finir en endurance, pour que cette sortie serve pour le foncier sur le long terme. Par ailleurs, mon ischio droit me rappelle qu’à force de trop en lui en demander, il me lance un prévis de grève totale. Je négocie donc une réduction du rythme, et accorde une prime de repas gargantuesque de trucs bien gras, histoire que ces forçats du bitume pensent avoir gagné une lutte sans savoir que d’autres l’auraient gagné sans avoir à négocier. Cela vous rappelle-t-il quelque chose ? Nan. Je n’en reviens pas que tu continues à lire ce texte, alors que je n’en suis qu’au 23 km, et tu as tellement de choses à faire. M’enfin, chacun gère son temps comme il l’entend. Quoi ? Pfff.

Deuxième tour... Un nouveau départ

Pour les plus anciens d’entre nous, c’est une toute nouvelle boucle qui débute. Avec une mémoire défaillante, due à une maladie dont j’ai oublié le nom, genre aljazira, mais qui se termine en zeilhmer... Cette nouvelle boucle est donc une toute nouvelle découverte. Pour un tocard comme moi, je reconnais quand même quelques passages. L’endroit où je me suis arrêté faire pipi, le trou sur la route où je me suis tordu la cheville, enfin bref, des détails importants qui font que ce sport pousse l’être humain vers un niveau supérieur. Une nouvelle averse, pratiquement au même endroit qu’au premier tour, mais moins forte, vient nous rappeler que si nous nous étions donné un peu plus aux entrainements, nous serions déjà au chaud, au sec, en train de manger un truc bien gras, sucré, bourré de conservateurs et de colorants. Mais non. On tourne toujours sur cette boucle interminable, en se demandant si l’on devait rendre la chambre de l’hôtel à 11h30 ou à 12h30, étant donné que l’on va arriver vers 13heures30. Bref, tout va bien...

Allez Chicago !

Tocardo avait arboré son beau t-shirt du marathon de Chicago, couru en octobre. Pourquoi ? Il ne savait même pas lui-même. Mais courir en débardeur lui semblait un peut too much pour une fin novembre dans ces contrées. La peur du froid. Donc, pour lutter contre le froid, il faut opter pour une couleur sombre. Et le hasard a déterminé le choix de ce t-shirt. La vie révèle parfois des destinées inimaginables. Tu as envie de découvrir la suite ? Hein ? Trop fort. Alors pourquoi pas. Jamais mis, fallait tester ce T-shirt. Et la chose la plus surprenante étant que le Chicago inscrit en vert sur fonds noir se voit bien de loin, trop bien. Et bien oui... J’ai reçu de nombreux encouragements "Allez Chicago !"... Véridique. Preuve que l’intelligence est uniformément répartie entre les athlètes et les supporters.
Toutefois les prénoms étant présents sur les dossards, de nombreux "Magnifique Denis", "Talentueux Denis", "Denis mon héros", "Denis je t’aime", "Trop fort Denis", "Denis Président !", raisonnent encore dans ma tête, lors de mon dernier sommeil, avant mon réveil.
Et pendant ce temps, ils courent encore...

Arrivée en vue

Et enfin, après avoir retracé le déroulé de ma vie, l’heure des braves approche. Le font de mer, et ce dernier km et demi est comme une victoire sur l’adversité. Le cerveau décrète la survie possible et libère des ressources que jusqu’alors il disait, épuisées. Sacré menteur celui-là, il pourrait faire un bon politicien. L’ischio ne rechigne plus et la barrière subsonique des 12km/h est franchie. Et c’est ce fameux passage sur les planches de Deauville que l’on ne va fouler donc qu’une seule fois, lors de l’arrivée. Le cerveau pense à déclencher un sourire non forcé afin que les photos qui seront achetées une petite fortune montrent un être élégant raffiné, en pleine forme. Un athlète et un acteur, les meilleurs faisant croire que l’effort est aisé. Il n’en est rien. Mais le montrer serait sans doute un aveu de faiblesse. Bref, sourire aux lèvres, yeux ouverts tant que possible malgré les cernes, tête pas trop basse, et allons franchir cette p* de ligne d’arrivée ! Done ! En 3 heures, 24 minutes et des secondes, mais moins que 60 (sinon cela aurait fait une minute supplémentaire, tu le savais ? Allez ne ment pas !)...

That’s it, l’essentiel est fait. Une belle médaille et un goûter offert, deux bouteilles d’eau. Un arrêt à la consigne pour récupérer mon sac, la queue est longue (des consignes, les athlètes eux sont eux frigorifiés, donc c’est plutôt petit... Du moins j’imagine, n’étant pas aller vérifier par moi-même), mais 5 minutes suffiront pour récupérer de quoi me réchauffer. Sont forts aux consignes, sacré rythme ! Retour à l’hôtel en marchant avec peine. Douche plus que chaude et je rends ma chambre à 14 heures (11h30 normalement...). Retour à la maison, bouchons à l’approche de Paris, je cherche alors les meneurs d’allures, je klaxonne, je m’agace, appels de phares, rien n’y fait... La vie ne serait elle pas qu’un éternel recommencement ?